Je suis né le 18 juillet 1956 à Port-au Prince, d’un père insouciant et d’une mère qui a trop d’enfants pour s’en occuper normalement, d’une mère à qui je dois tout, depuis le lait maternel jusqu’au pain de l’éducation.
Puisque me mère était seule, elle travaillait dur pour me faire éduquer. Je suis allé à l’école dans des conditions difficiles, parfois sans n’avoir rien mangé mais grâce à ma persévérance et à ma ténacité, j’ai pu aller jusqu’en classe de première.
Après cela, la vie était toujours difficile et pour ne pas succomber sous son poids, je suis allé passer mon temps dans une école primaire où j’enseignais aux enfants de C.P. Voyant que je ne pouvais pas assurer mon avenir, j’ai décidé de m’émigrer et me voici en Guyane.
Avant mon départ, je n’avais ni femme ni enfant, j’étais vraiment un célibataire mais, pas un célibataire endurci puisque j’avais des relations libres avec des femmes.
Il y avait une fille à qui j’avais fait une promesse de mariage. En ce moment, je ne sais pas si je vais tenir ma promesse ou pas, vu que mes possibilités matérielles ne sont pas tellement stables.
Ici en Guyane, c’est autrement. Les femmes c’est une question de l’argent avec l’argent. On peut coucher autant que l’on veut. Quand je suis arrivé en Guyane, j’avais des problèmes pour avoir des relations sexuelles parce que je ne travaillais pas encore. Comme je n’avais pas d’argent, j’ai passé trois mois sans connaître de femmes. Soudain, j’ai eu un petit boulot. Dès la première paye je me suis décidé à « faire graisser mon moteur ». C’est ainsi que j’ai pu coucher avec une femme moyennement deux cents francs pour la nuit.
J’ai eu une relation avec elle durant un mois. Pas en tant que mari et femme mais en tant que:
Djal, c’est-à-dire une relation une fois par semaine avec promesse de cinq cents francs quand le mois est tombé.
C’est justement pour cela que nous avons rompu parce que je ne pouvais pas m’acquitter de ma dette. A ce moment, je n’arrivais pas à toucher tout mon argent.
J’ai failli voir 4 saison dans un mois!
Je prends « fer », je reconnais le même moment qu’avant, vide, sans amie, humilié, mélancolique. C’est à ce moment que j’ai fait connaissance de M. B et que j’ai commencé à travailler pour une association qui joue un grand rôle dans ma vie et c’est grâce à l’association que j’ai pu avoir ma partenaire. A ce moment, j’étais sans travail, sans parents, je vivais au jour le jour.
Je me suis mis à la courtiser, elle est tombée amoureuse de moi et nous avons eu des relations sexuelles. Nous sommes devenus très attachés, au point où je suis venu loger chez elle. Depuis lors, nous sommes ensemble, elle sait tout de moi et elle est tout pour moi depuis A jusqu’à Z.
Maintenant, elle m’a conçu un joli bébé que j’aime de tout mon cœur.
Je ne travaille pas et elle ne travaille pas mais elle touche des allocations familiales. C’est grâce à cet argent que nous pouvons subsister. Elle a déjà 4 enfants que je considère comme les miens et avec le mien, cela lui fait 5 enfants. Avec toutes ces allocations, elle peut assurer à elle seule tout l’entretient de la maison.
Quand je veux envoyer quelque chose en Haïti pour ma mère, c’est elle qui me le donne.
Depuis que je suis avec elle, j’ai quand même eu des relations avec des femmes haïtiennes et étrangères. Avec ces femmes les relations étaient gratis mais avec d’autres, j’ai payé, pas beaucoup, un prime de 100 F pour un moment. Avec une Guyanaise, je ne donne rien sinon que des promesses jusqu’à présent. Que je ne peux m’acquitter.
Ma partenaire est très bonne avec moi, si je pouvais passer toutes ma vie avec elle, je n’hésiterais pas un moment à le faire mais elle a l’intention d’aller rejoindre le père de l’un de ses enfants qui vit actuellement à Miami. Moi j’ai un projet de mariage avec ma fiancée. Si elle consent à vivre avec moi, je vivrai avec elle.
Parfois, nous menons un train de vie moyen et à la fin du mois, nous vivons comme des pauvres
Le mois dernier en août, les rentrées furent d’environ 3,500F. Cet argent vient des allocations 850F, le remboursement de l’accouchement par la DASS 1,165F, remboursement d’une dette 1,000F, l’argent reçu du papa du petit de Miami 100$ et le reste vient de petits boulots. Les dépenses pour le loyer, 12F, l’eau pour 6 mois 200F, achat d’un Moulinex 200F, fourniture d’école uniformes, nourriture t tout), 1000,F, , envoie d’argent pour ma mère en Haïti 40$.
Sa mère vit ici en Guyane et nous aide pour la nourriture.
Malgré le train de vie difficile que nous menons, certaines nous considèrent comme des privilégiés. Pourtant, nous sommes parmi ceux qui vivent mal, qui mangent mal, qui habitent dans des milieux malsains.
À la lumière de ce récit, on comprend mieux la situation des Haïtiens en Guyane